Jacques-Émile Ruhlmann (1879-1933) est un décorateur français d’origine alsacienne. Il se forme auprès de son père en allant sur les chantiers. Peu à peu, le jeune Ruhlmann se dirige vers la réalisation de meuble bien qu’il ne reçoit pas une formation d’ébéniste.

Il expose pour la première fois au Salon d’Automne de 1913. Le décorateur estime que l’art de l’époque résulte de l’union de toutes les disciplines, tout en admettant une certaine supériorité à l’architecture. Ruhlmann recommande effectivement aux étudiants de l’École Boulle d’être avant tout des architectes, des ingénieurs, des constructeurs, et de moins être de simples décorateurs ornemanistes.

Le décorateur ne choisit pas d’abandonner le passé pour se consacrer à un modernisme novateur comme Le Corbusier. Il préfère concevoir des formes qui succèdent naturellement à la production du XIXe siècle avec des formes pures et fonctionnelles. Cependant, il va au-delà de la pastiche pour donner un nouveau souffle à l’ameublement, comme avec l’usage du placage ou l’utilisation du galuchat qui sont tombés en désuétude. Ses œuvres expriment la maîtrise des formes, la rigueur des lignes, la sobriété des décors, l’exécution fine. Il s’intéresse à la finesse, l’équilibre et la logique d’un meuble pour en montrer toute l’élégance. Par exemple, les galbes sont à peine perceptibles, les tracés sont nerveux et les pieds étirés en minces fuseaux. De plus, il possède une prédilection pour les coloris assourdis rehaussés de notes claires et l’usage des bois exotiques pour les placages unis ou disposés en figures géométriques.

Selon lui, il faut « rallier à l’esprit moderne une élite qui demeure l’arbitre du goût, sans prétendre qu’il faille ne penser qu’à elle », le style, la mode ne se fait pas par le bas. De ce fait, sa riche clientèle peut se permettre de demander des fantaisies, même si finalement Ruhlmann vend ses créations en dessous du coût réel de fabrication. Il faut attendre l’Exposition internationale des Arts décoratifs de 1925 pour qu’il assoit un renommée internationale grâce à l’Hôtel du Collectionneur où de nombreux artistes ont collaboré avec lui (comme Le Bourgeois, Pompon, Legrain, Dunand, Jaulmes, Décorchemont, Brandt, Linossier et Rapin). Cette demeure patricienne réalisée par Pierre Patout, est une véritable vitrine pour les artistes décorateurs français.

Certaines œuvres de Ruhlmann ont décoré les paquebots Île-de-France et Normandie.

Ruhlmann a profondément influencé l’art de l’ameublement du XXe siècle par ses nombreuses productions et ses interventions à l’École Boulle. Il est aujourd’hui considéré comme le « Riesner de l’Art Déco ».

Bibliographie

CAMARD Florence, Ruhlmann, Éditions Monelle Hayot, Paris, 2009.